L'origine étrusque des anciens ports de PISE
Adossée aux monts Pisani, face
à la mer Tyrrhénienne, Pise se déployait sur l'estuaire saumâtre de l'Arno qui
fut, jusqu'à Livourne, une immense lagune jusqu'au XIIe siècle. Des
plages, jetées et embarcadères permettaient aux navires de connecter un immense
réseau capillaire de fleuves, de rivières et de lacs comme véritables voies de
commerce, interreliées aux activités de l'arrière-pays.
Ville étrangement distante à 12km du littoral aujourd'hui, les sources historiques livournaises ont pourtant attiré l'attention sur un éventuel "fantôme portuaire pisan". Bien que sa localisation soit encore controversée, le paysage actuel semble recouvrir les traces d'un port étrusque et trois pôles d'activités d'un haut Moyen-âge prestigieux. Pour situer ce complexe, indissociable de l'histoire du commerce, d'enjeux et de dynamiques fondateurs de la République maritime de Pise, une analyse régressive semble pouvoir éclairer les facteurs de son apogée et son déclin.
Certains textes romains évoquent des infrastructures fluvio-maritimes comme l'un des pôles des plus influents de Méditerranée au IIe siècle : Portus Pisanus, genèse pourtant occultée d'une excellence maritime, militaire et commerciale du haut Moyen-âge. De récentes études scientifiques et données stratigraphiques confirment les mutations spectaculaires subies par cet environnement, comme en témoignent aussi différents textes, cartes, iconographies et matériel archéologique. L'héritage des bâtis, autant diversifié qu'original, retrace un schéma cartographique inédit de la ville, de son identité urbaine et maritime comme maillon incontournable d'une histoire européenne plus globale. Dans ses aspects environnementaux, archéologiques et historiques, Pise démontre des cycles de vie hors du commun, une histoire d'hommes face à un littoral qui n'a eu de cesse de pousser à des réaménagements aux conséquences sociales et économiques irréversibles.
Elodie PECHARD, Recherche de Master sur les ports médiévaux, novembre 2023, 31 p.
Contenu
I - UNE COMPLEXITÉ ENVIRONNEMENTALE, ARCHITECTE DE LA PISE MÉDIÉVALE
1.1 - Un environnement maritime, fluvial et palustre…..
1.2 – L'une des plus importante histoire navale, commerciale et miliaire de Méditerranée.
2 – DE SOURCES LACUNAIRES A LA PHYSIONOMIE D'UN IMMENSE COMPLEXE PORTUAIRE.
2.1 - L'iconographie comme confirmation d'une ville entre fleuves et mer Tyrrhénienne.
2.2 - Des précisions portuaires et urbaines d'après les sources littéraires médiévales.
2.3 - Des archives médiévales pourtant lacunaires…..
2.4 - Des détails urbains et portuaires d'après les textes antiques.
2.5 - Localisation et cartographie des anciens sites portuaires.
3 - UNE HISTOIRE MARITIME AUSSI GLORIEUSE QU'OUBLIÉE.
3.1 – Une évolution économique, juridique, fiscale et politique régie par l'activité portuaire.
3.2 – Une évolution environnementale responsable de suprématie comme d'oubli
3.3 – Des aménagements et infrastructures dépassés par les aléas naturels.
4 – UNE HISTOIRE FLUVIALE À FAIRE ÉMERGER.
BIBLIOGRAPHIE
*
UNE COMPLEXITÉ ENVIRONNEMENTALE, ARCHITECTE DE LA PISE MÉDIÉVALE
Un environnement maritime, fluvial et palustre…
À la
croisée longitudinale nord sud de la péninsule italienne et transversale Est Ouest de l'estuaire de l'Arno, ses plaines, marécages, rivières, lacs et
bassins, Pise est un système urbain de 195000 habitants répartis sur 475 km2,
localisé au 43°43 Nord et 10°24 Est. L'ancien port
toscan s'étendait en un complexe maritime et fluvial aux nombreux débarcadères jalonnés
le long de canaux et rivières depuis la lagune. Aujourd'hui à 12km de l'espace
maritime et à 20km au nord de Livourne, Pise reste orientée sur son littoral, reliée
par voies terrestres et ferroviaires vers Gênes au nord et Rome au sud.
Pourtant, les atoutsgéomorphologiques qu'offrait le site ont permis l'intégration d'un complexe portuaire proche de l'actuelle ville, révélé par de récentes fouilles. En comprenant l'ensemble du rivage, de la basse vallée fluviale, son ancienne lagune, zones humides et canaux naturels navigables, Pise pourrait se redéfinir comme un « havre » naturellement protégé entre au nord le Serchio et des débarcadères fluviaux en zones humides, puis la lagune abritée où se positionne la zone urbaine. Bien que de rares textes la citent comme « havre », elle porte principalement le nom de « Portus » pour probablement indiquer la porte d'entrée entre mer et fleuves sur le Calambrone au nord de Livourne[1].
Hydrographie et niveau de la mer comme facteurs d'installation urbaine
Les données paléoenvironnementales du Scientific Reports publiées en 2018 reconstituent le Niveau Relatif de la Mer (RSL) du bassin pisan sur 10500 ans. 31 points d'indices démontrent qu'en 8500 av. J.-C., la mer se situait 35m en dessous du niveau actuel, puis serait fortement remontée vers 5050 av. J.-C dans le centre et le nord de la méditerranée occidentale. Ceci correspondrait à une déglaciation des zones nord-américaines, amenant une baisse progressive de 1.5m sous le niveau actuel jusqu'en 4000 av. J.-C.
Dans une nouvelle phase jusqu'en 2045 av. J.-C, le delta subit une montée des eaux introduisant le sel à l'intérieur des terres, inondant de manière prolongée les sols devenus infertiles jusque dans les bras de fleuves. Cette modification aurait permis l'installation de Portus Pisanus, telle que décrite dans le monde antique et jusqu'au XIIe siècle. La montée des eaux aurait favorisé sa position stratégique sur la devanture maritime, connectée aux canaux d'un estuaire envahi dorénavant par la mer[2].
Aujourd'hui, la ville est traversée par l'Arno, pourtant de la période étrusque, romaine puis médiévale, les activités urbaines et maritimes se positionnaient sur un coude de l'Auser, en aval sud de la ville, qui fusionnait avec l'Arno. La révélation de cette localisation explique l'emplacement de la Cathédrale aujourd'hui décalée du centre historique. Or, cet espace urbain est confirmé par la densité de peuplement avant le Ier siècle et jusqu'au Ve siècle, comme centre portuaire reliant la lagune, les zones humides agricoles, les canaux et fleuves avec l'arrière-pays (Fig.3). À la charnière de l'antiquité et du Moyen, âge, l'estuaire subit une modification hydrographique majeure, l'Auser modifie sa trajectoire vers la mer et se dissocie de l'Arno. L'ancien ancien port repose alors sur un lit de fleuve asséché qui devient une zone marécageuse abandonnée. À la fin du Moyen-âge, le bassin lagunaire se retrouve confiné par l'accumulation de sable du delta, un nouveau port se fonde alors à Livourne[3].
Des données biologiques concomitantes avec l'histoire
Cette évolution environnementale se confirme avec de récentes recherches biologiques sur les alluvions. Plusieurs carottages de la plaine pisane et livournaise ont fourni des indicateurs tant marins que terrestres, montrant une activité proche d'un bras de fleuve, aujourd'hui disparu : l'Auser. Des analyses de pollen, de végétation et de composants marins ont permis de confirmer l'agencement naturel de l'ancienne zone portuaire antique. La végétation d'arrière-plage, comme les arbres (pins et chênes), dépendait d'une influence maritime. La forêt mixte, les prairies, marais et plans d'eau de l'arrière-pays auraient été influencés par les apports du fleuve Calambrone, une zone marécageuse séparant Pise de Livourne. Une troisième zone de forêt chaude aurait été impactée en 3300 ans av. J.-C par des activités agricoles, la culture de céréales, d'oliviers, de vignes, de vergers puis les chantiers de production de bois pour l'exportation. De plus, les sédiments démontrent qu'à 10km au sud de la Pise actuelle, une zone portuaire aurait été très active à l'époque archaïque étrusque (VIe-Ve siècle av. J.-C), jusqu'à la période romaine tardive au IVe apr. J.-C. Cette activité se serait complètement déplacée vers Livourne au XIIIe siècle, où des constructions ont pu former un bassin portuaire plus fortifié[4].
Topographie et photogrammétrie comme confirmation des espaces portuaires
Le déplacement vers Livourne serait la conséquence de dépôts, de cumul d'objets et d'une zone de ralentissement de courants par suite de 6 inondations majeures ayant métamorphosé le paysage pendant neuf siècles. La photogrammétrie de l'embouchure actuelle de l'Arno vers la Marina de Pise et le parc régional Migliarino montrent que la dynamique fluviale aurait fortement influencé l'évolution spatio-temporelle du milieu naturel, configurant de fait, les zones urbaines et périurbaines sur cinq millénaires[5].
L'archéologue G. Gattiglia rappelle que les hypothèses sur la topographie et l'aménagement urbain reposaient jusqu'alors sur peu de preuves matérielles ou d'archives. De nouvelles recherches ont pu préciser que les activités anthropiques et structures du VIe au XVe siècle ont altéré le paysage par un phénomène de stratification. Le bassin sédimentaire de Pise est une zone côtière de 7km, alternée de dépôts issus des dynamiques maritime, éolienne et fluviale. Les sous-sols sont de substrats du Mont Pisani et de formations non toscanes provenant de l'Ouest ligurien. Un affaissement tectonique avec du sable, des strates argileuses et de la craie correspondraient à la rupture de communication entre la Méditerranée et l'Atlantique[6].
L'étude G. Sarti démontre qu'à l'antiquité, des zones humides se sont étendues dans la plaine pisane, utilisées pour des activités de pêche, comme source de fourrage, de matériaux et de carburant. Et, contrairement aux espaces de la région voisine de Grosseto plus au sud, ces marais n'ont jamais apporté de paludisme. Certains ont été aménagés avec des canaux de drainage entretenus pour favoriser l'agriculture, mais sont laissés à l'abandon au début du Moyen-âge provoquant de nombreuses inondations. Du Xe au XIIe siècle, les installations portuaires maritimes sont privilégiées pour redresser l'économie, or l'envasement bouche les accès de Portus Pisanus et, après la défaite de Maloria face au Génois au XIIIe, le déclin de Pise est inévitable[7].
Des zones d'occupation en perpétuelle réadaptation
La structure de la ville se caractérise par une identité sans hésitation aquatique pour laquelle les Pisans ont su adapter des espaces naturels face à des contraintes environnementales, utilisant des solutions techniques connectant Pise à une double zone d'activités, maritime près de l'île Migliarino, fluviale à Pise et Grado (Fig.2).
Les découvertes d'archéologie navale dans la zone de San Rossore, proche du centre de la ville, viennent confirmer l'existence d'un débarcadère antique sur le bras interne de l'Arno. Mais, bien qu'actif tout le haut Moyen-âge, Portus Pisanus est déplacé à 400m au Sud-Ouest du bassin pour cause de l'ensablement[8]. Une confusion d'interprétation de la localisation pourrait provenir d'un même intitulé dans les sources. En effet, Portus Pisanus est utilisé pour la zone livournaise comme pour le centre de Pise.
On peut identifier deux zones portuaires :
Des embarcadères maritimes sur le littoral
Des ports fluviaux sur l'Arno et l'Auser
- Portus Pisanus (au nord de Livourne)
- San Rocchino
- Ile de Migliarino
- Pisa
- Grado (Embouchure et front de mer)
- San Rossere (Lagune, Nord-Ouest de Pise)
L'une des plus importante histoire navale, commerciale et miliaire de Méditerranée
On atteste d'une installation à « Pisae » par les Étrusques au VIIe av. J.-C, avec un commerce actif grâce à des infrastructures utilisées jusqu'au IIe av. J.-C. Les multiples aléas naturels et pressions anthropiques transforment définitivement la lagune en lac côtier vers 1350, décalant le port principal vers les falaises du sud au XVe siècle. Cette transfiguration paysagère et, par conséquent, le déplacement des activités ont redéfini l'identité, les pouvoirs et l'économie de la ville. Pourtant, sa puissance navale depuis l'antiquité et au début du Moyen-âge se confirme par de nombreuses épaves retrouvées proches des bras de fleuves. Le site romain du Ier siècle av. J.-C, devenu Lombard au VIe siècle après J.-C, était fréquenté par le commerce gaulois, ibérique, sarde et corse, mais aussi plus lointain.
Les infrastructures du VIIIe siècle, principalement des jetées fluviales, confirment que l'urbanisation des zones de l'estuaire offrait une position stratégique pour le contrôle du commerce méditerranéen. Dès le IXe siècle, les pressions de la piraterie sarrasine, basée en Corse et en Sardaigne, poussent à développer une ingénierie navale et à fortifier la ville.
Au Xe siècle, Pise est la ville portuaire la plus importante de la province de Tuscie. « Portus Pisanus » désigne alors un complexe plus large que la ville, englobant l'arrière-pays nord de Livourne annexé à cet État indépendant. Parmi les quatre Républiques maritimes historiques de l'Italie médiévale, l'ensemble pisan est une puissance commerciale bien supérieure à Gênes et Venise. À son apogée, pour évincer les Sarrasins des terres insulaires italiennes, la ville s'allie à Gênes en 1017 déclenchant un conflit entre Républiques, les Pisans font évacuer les Génois de Sardaigne. Parallèlement, l'architecture militaire se déploie sur le littoral, une vigie côtière en tour carrée de briques est construite sur les falaises de Livourne, près de l'antique Villa Triturrita surplombant la « Cala dei Pirati ».
Quelques décennies plus tard, l'Amiral Orlandi assoit son pouvoir sur la Palerme sarrasine, dont les décombres du saccage fonderont, plus tard, la cathédrale Notre-Dame de l'Assomption. Hormis les conflits, l'expansion commerciale s'étend aux villes d'Afrique du Nord et Carthage jusqu'en 1035. Des travaux contre l'ensablement sont réalisés, une chaine est tendue entre deux tours pour sécuriser l'accès au port. Devenu une entité politique incontournable en 1060, Grégoire VII impose les Lois & coutumes de la mer établies par les Pisans en 1077, suivi par Henri IV qui leur reconnait l'indépendance comme la possibilité d'élire leurs propres consuls. Urbain II, la désignera Archevêché suzerain sur la Corse et la Sardaigne, leur offrant une position stratégique prédominante. Reconnue par tous les souverains d'Europe, la marine de guerre pisane se fait engager pour des actions mercenaires en 1088. En 1092, le roi de Castille Alphonse VI en usera pour libérer les terres valenciennes.
Au XIe siècle, la domination pisane sur les Républiques d'Amalfi, Gênes, Venise et tout l'espace maritime occidental catalyse les mouvements tant commerciaux que politiques et religieux. Porto Pisano ouvre un passage aux pèlerins vers Rome, Jérusalem ou Saint-Jacques-de-Compostelle. Prisée pour ses infrastructures et terres fertiles, l'escale dispose de points d'approvisionnement d'eau, de moulins sur les berges fluviales et de nombreux marchés d'échanges. En 1173, comme un phare sur la mer, une tour est construite sur la place des Miracles, symbole de l'architecture romane mondialement connu depuis son inclinaison due aux fondations sur un sol alluvionnaire et marécageux.
Lors de cet apogée, la fortune pisane finance des entreprises maritimes et la fondation de colonies en Afrique du Nord, en Espagne en Asie Mineure. L'Archevêque Daiberto pousse les croisades vers le Moyen-Orient, installant des relations avec l'Empire byzantin et le monde islamique. Au XIIe, la République maritime de Pise qui, au-delà d'une suprématie commerciale, développe une renommée artistique et scientifique, continue d'irriter ses voisins. En 1284, le déclin s'annonce avec la bataille navale de Meloria contre Gênes. Perdants et révoltés par les conditions imposées par les Génois, les Pisans détruisent les tours, rendent impraticable l'estuaire par des remblais, bloquent le port en coulant une nef remplie de matériaux. Alluvions, débris, inondations imposent dès lors des travaux de poldérisation séparant désormais Pise de la mer. L'entretien du port coûte, les mouillages sont ensevelis, des invasions détruisent les facilités et les canaux fluviaux s'envasent, marquant un désintérêt progressif jusqu'au XIVe siècle. Selon l'Itinerarium Syriecum (1358) de Pétrarque, Pise n'était plus alors qu'une annexe du port livournais[9].
DE SOURCES LACUNAIRES A LA PHYSIONOMIE D'UN IMMENSE COMPLEXE PORTUAIRE
L'iconographie comme confirmation d'une ville entre fleuves et mer
Les espaces sociaux de la Pise du haut Moyen-âge sont organisés par les structures urbaines, des enceintes, églises, tours et des structures portuaires comme des ponts, quais et arsenaux. La Tour « penchée » affaissée en 1185, campanile et phare sûrement plus maritime que religieux, évoque une cité positionnée sur le front de mer. Mais quels éléments iconographiques pourraient reconstituer l'image du port pisan médiéval ?
Dans les arts figuratifs médiévaux, l'image de Pise reflète souvent une propagande issue d'activités communautaires ou de seigneuries. Des éléments héraldiques, des inscriptions viennent préciser l'identification de la ville. Dans « Portraits de ville : Vision et mémoire entre le Moyen-âge et le XVIIIe siècle »[10], Lucia Nutti recense plusieurs représentations d'espaces urbains et portuaires, puis les spatialise dans « Cartographies sans papiers. L'espace urbain décrit du Moyen-âge à la Renaissance »[11]. Au XIIe siècle, l'image de la ville dépend d'une communication politique et religieuse illustrée pour propager des idées et une nouvelle politique de construction. La plupart des citoyens ne sachant pas lire, l'image devient un message accessible même par les ennemis. Les illustrations, sceaux, fresques, monnaies relayent une iconographie pisane représentative de sa grandeur, de schémas politiques, de mentalités, de courants culturels et de ses transformations sur plusieurs siècles[12].
Inspirées d'une carte romaine de 350 de notre ère, les cartes de
Peutinger de 1265 montrent les deux tours d'accès par Livourne, encadrées par
le Calambrone et l'Arno, faces au front de mer. Un bas-relief de 1290,
retrouvé à Gênes, détaille les chaines au niveau des tours Magnale et Formice à
l'entrée du port de Livourne (Fig.5).
Sur des fresques pisanes de 1377, relatant l'arrivée de Saint Ranieri, la Cathédrale Notre Dame de l'Assomption donne directement sur le fleuve qui serait l'Auser.
Cette proximité fluviale et maritime se confirme avec une illustration des Chroniques de Pise de 1470 sur laquelle on remarque la tour-phare près de l'eau (Fig.7). Chaque œuvre resitue une ville au cœur même d'un complexe portuaire tant fluvial que maritime.
Des précisions portuaires et urbaines d'après les sources littéraires médiévales
Pour bien situer les ports fluviaux et maritimes de l'époque médiévale, plusieurs textes témoignent de certaines localisations et d'infrastructures.
> Environnement et infrastructures de Pise selon les sources littéraires médiévales
Texte : De
reditu suo (Livre I). Voyage depuis Rome vers la Gaule et Pise : « Gorgone
s'élève au milieu des flots qui la baignent, entre le rivage de Pise et celui
de Cyrnos », puis, « Ils déballent, lient les voiles et les
cordages aux coutures. Ils tentent de s'accrocher à la jetée, la mer
Tyrrhénienne est secouée de tumulte. À la bouche de l'Alphée, ils ont pris
les quais de Pise ». Son passage à Triturrita : « Le port voisin attise
mon admiration, c'est le marché de Pise, la mer y apporte ses richesses. Ce
havre [...] est battu par les flots de la pleine mer, ses rivages découverts
sont exposés à tous les vents. Ce n'est point une baie abritée par des jetées
qui puisse braver les menaces d'Éole, mais de grandes algues qui s'enlacent
dans ses eaux reçoivent les navires qu'elles heurtent doucement tout en
cédant aux flots. Elles enchaînent leur violence et empêchent ainsi la mer de
venir y rouler ses vagues énormes ».
Plus loin : « Je me rends moi-même à Pise où je vais habituellement par la route. […] Je contemple l'antique cité originaire des bords de l'Alphée qu'entourent les eaux jumelles de l'Arnus et l'Ausur. Le confluent des rivières forme un cône pyramidal plus étroit sur le sol, mais il conserve son propre nom, et ce, jusqu'à la mer. Du pont, seul bien sûr l'Arnus y passe. […] L'Étrurie reçut les Pisans lorsqu'ils étaient venus d'Élide, nom qui atteste de leur origine […]. De Pise à Triturrita […] tout à coup le ciel se couvrit de sombres nuages, des éclairs jaillissent déchirant le ciel. Nous sommes arrêtés, car qui oserait, par un temps orageux, se confier à la mer en folie ? »[13].
Texte :
Historia Langobardorum. Description de Charlemagne poursuivant
Adelchi fuyant de Pise vers Constantinople : « […] lorsque Charles,
traversant les Alpes, avait commencé à entrer en Italie, les Lombards sortant
de leurs tentes s'enfuirent tous, sans que personne ne les poursuive. […]
Charles assiégea de tous côtés la même ville et, après avoir placé des
gardes, il arriva à Vérone pour poursuivre Adelgis, fils de Desiderius qui,
craignant l'arrivée d'un si grand roi, s'enfuit secrètement au bout de
quelques jours vers Portu Pisano d'où il prit une route maritime vers
Constantinople, avec la certitude de ne plus jamais revenir dans sa
patrie. »[14].
Texte : Historia
Jerosolimitan décrit la puissance navale des Pisans : « Les
Vénitiens aussi, les Pisans et les Génois, ceux qui étaient soit sur la côte
de l'Océan, soit sur la mer Méditerranée, ils habitaient la mer à bord de
navires chargés d'armes et d'hommes, de machines et de fournitures. Ils
couvraient les flots et ceux qui marchaient sur la terre, sur toute la terre
comme des sauterelles, ils ont tourné les yeux. »,.[15]
Texte : le Vita Mathildis évoque Pise comme un
intermédiaire majeur entre l'Est et l'Ouest durant tout le Moyen-âge ;
« Celui qui va à Pise y voit des monstres marins. Cette ville
appartenait aux païens, aux Turcs, aux Libyens et aux Parthes. Sordides
Chaldéens qui surveillent leurs rivages sombres » [16].
Texte :
le Kitab al-Dja'rafiyya décrit : « Il a traversé une rivière
appelée Rivière de Pise qui descend du Mont Mandja […] Sur cette rivière, il
y a un grand pont construit sur huit arches par lesquelles un navire peut
passer toutes voiles dehors, équipées de portes en bois renforcés de fer qui
se ferment la nuit et s'ouvrent le jour par peur des navires musulmans. […].
Entre la ville et la mer, il y a une distance de deux parasanges. Ses
habitants sont très bons à la guerre et, pour la plupart, des marins
qualifiés. Ils font partie des meilleurs fabricants de fortifications, de
tours et d'outils. Ce sont de redoutables combattants sur la mer. Ils
regorgent de bois de construction, mais travaillent aussi le fer à partir
duquel ils fabriquent toutes sortes d'armes de qualité, comme la cotte de
mailles, les casques et lances. C'est d'eux que viennent les épées pisanes […]
aussi tranchantes, sinon plus, que les épées indiennes. Parmi eux, le
cavalier et sa monture sont autant couverts par une armure, qu'on ne voit
plus rien de lui. Ce sont aussi des marchands de terres et de mer qui
remontent jusqu'aux limites de la Syrie, jusqu'à Alexandrie et l'Égypte, aux
extrémités du Maghreb et Al-Andalus. D'eux proviennent la térébenthine, le
cuir, le safran et le coton »[17].
Texte : Séfer ha massa'ot ou Le Livre des voyages. Le voyageur décrit
Pise comme « une très grande ville avec environ deux mille maisons avec
des tours afin de se battre en temps de guerre »[18].
Texte : Kitâb
Rudjâr ou Livre d Roger. « Pise avec ses
fortifications, ses bateaux et chevaux, et ses entreprises maritimes
étonnantes » et « Pise est une métropole du Rûm, son nom est célèbre,
son territoire est étendu. Elle a des marchés prospères, des maisons bien
habitées, des promenades spacieuses et une campagne vaste et abondante de
vergers et de jardins et de semis ininterrompus. Les forteresses sont hautes,
les terres fertiles, les eaux abondantes, les monuments sont magnifiques. La
population possède des bateaux et des chevaux et est toujours prête à des
entreprises maritimes au-dessus des autres pays. La ville est située au bord
d'une rivière qui provient d'une montagne du côté d'Ankubardah (Longobardie).
Cette rivière est grande et possède des moulins et des jardins sur ses
rives »[19].
> À noter que E. Cristiani, reconnu pour ses études de sources inédites, a publié de nombreuses données sur le port médiéval dans la Revue Bolletino storico Pisano. Certaines viennent contredire les travaux de l'historien G. Volpe fondés sur un manuscrit de 1188, en réalité un faux document créé au XVIe par Flaminio dal Borgo pour démonter une ascendance notable[20].
Des archives médiévales pourtant lacunaires…
L'oubli de la puissance pisane provient en partie d'un manque de sources comme le stipulent les historiens. En effet, la disparition de la majorité des archives avant le XIIIe siècle, laisse peu d'informations sur les archives d'état, de Maitres de port, les commissions de péages ou les fonds comptables, ni même sur les affaires criminelles de marins. Quelques extraits pourtant informent de particularités sur la République maritime de Pise.
Archives d'État
Quelques documents d'institutions et chartes de communes ont été rassemblés aux Archives d'État en 1860. Peu de parchemins, actes diplomatiques ou inventaires font partie de ces fonds. Des actes impériaux et pontificaux stipulent des privilèges pour la municipalité et l'Église, certaines correspondances entre la République, les souverains de Naples, le Duc de Milan et quelques statuts du Breve Consulum Pìsanae Cìvìtatìs de 1162, sont conservés sous le nom de Comune, Divisione A, Instrumentari. En tant que puissance navale, Pise a joué un rôle intermédiaire majeur au XIe siècle dans la libération de la domination musulmane en Méditerranée occidentale. Plusieurs expéditions militaires sont menées en Calabre, en Sicile ou en Espagne. Associées aux bénéfices des productions agricoles, les recettes de pillages contribuent à l'essor de la ville. La redistribution des richesses s'opère dans de nombreuses commandes architecturales, comme l'édification de la cathédrale[21].
Dans les actes publics du fond diplomatique des Archives d'État de Pise et Florence, une soixantaine de correspondances diplomatiques du XIIe au XVe siècle, évoquent le commerce et un traité de paix entre Pise et l'Égypte. Des lettres de marchands, des instructions pour les ambassadeurs, des sauf-conduits traduits en deux langues (arabe-latin, puis italien), des contrats originaux illustrent les modalités diplomatiques médiévales pisanes. En 1130, alors que les puissances musulmanes interfèrent avec l'Occident, que des Normands s'installent en Sicile et des raids se perpétuent sur les côtes d'Afrique du Nord « Ifrîqiyen », une trêve de dix ans est conclue par la délégation du Sultan almoravide envoyée à Pise. S'en suivent pourtant des actes de piraterie contre des marchands d'Alexandrie par les Pisans, ayant pour conséquence des négociations et une activité diplomatique, cette fois menée par un personnel mandaté et qualifié. Un premier traité est conclu en 1153 entre l'ambassadeur R. Bottaci et le calife Al-Zafir qui démontre Pise comme une puissance maritime pionnière dans les relations diplomatiques. Des accords ultérieurs rétabliront l'implantation de comptoirs marchands en Égypte[22].
Quatre ans plus tard, l'émir de Tunis, Ibn Abi Khurassan, négocie auprès de l'Archevêque de Pise par échanges épistolaires afin de renouveler un traité de paix, de protéger les marchands et établir de nouveaux privilèges. Ces courriers constituent les premières modalités de traités diplomatiques rédigés. Dès 1186, le traité évolue au-delà de l'espace maritime du Maghreb, accordant aux Pisans la liberté de commercer dans la plupart des ports, à la fois pour apaiser les relations avec l'Italie, mais aussi pour accroitre les recettes fiscales[23].
Un capitalisme marchand en quête de nouveaux marchés et une démographie croissante permettent une expansion vers le Levant. Toutefois, après la prise de pouvoir par Florence au XIVe siècle, ainsi que la concurrence et le paludisme, le déclin des activités marchandes s'enclenche avec la décroissance de nombreux avant-postes commerciaux[24].
Traités commerciaux
Dans le traité de Portovenere de 1169, les Génois contraignent les Pisans à n'utiliser que l'itinéraire délimité du Juxta terram vers l'Espagne et l'Afrique du Nord. En résultent des accords et un droit international encadrant les relations entre puissances maritimes. Des traités sont signés, par exemple, en 1143 entre Gênes, Pise et le port de Montpellier, qui autorise les navires entrants, mais ne garantit pas leur sécurité. En 1171, Gênes interdit tous navires pisans pendant la durée de guerre. En 1177, Pise renforce ses relations avec Montpellier, garantissant que les citoyens pisans feront tout pour assurer aux Montpelliérains, et tous leurs biens, la sécurité dans les zones à l'intérieur et à l'extérieur de la ville[25].
Archives privées, cartulaires et portulans
Les intérêts politiques et commerciaux pisans se sont étendus dans toute la Méditerranée orientale, toutefois, les archives ayant été détruites en 1406, la plupart des archives privées ont évacué avec l'exode de nombreuses familles, des cartulaires notariés sont manquants, sauf à Gênes et Venise[26]. Le manuscrit « Gesta Triumphalia » redécouvert en 1900, décrit une brève expédition d'Henri V en 1110, puis celle aux Baléares et la subvention de l'archevêque de l'autorité ecclésiastique de Corse pour consacrer la cathédrale en 1118.
L'historien militaire, B. Maragone (1110-1188), décrit l'expansion maritime des Pisans et leurs expéditions pour libérer les chrétiens prisonniers, citant même une reine musulmane convertie puis installée à Pise, dont une inscription commémorative peut encore se lire sur la façade de la cathédrale[27]. Découvert à Pise, sans signature ni datée, la « Carte pisane » considérée comme l'un des plus anciens portulans, aurait été achetée en 1839 par la Bibliothèque Royale. La croix de Malte rouge pourrait faire référence aux croisés latins en Terre sainte en 1290. Elle indique des noms des ports et de havres inscris perpendiculairement aux tracés des côtes, des échelles de distances de l'océan Atlantique Est à la mer Méditerranée et une partie de la mer Noire.
L'âge
radiocarbone d'un fragment confirme une date de réalisation entre 1170 et 1270
apr. J.-C[28]. Elle
aurait été tracée par un cartographe de Gênes ou de Venise selon une carte
portugaise. Le "Compasso da navigare" de 1296 conservé à Berlin pourrait être
le routier qui accompagnait la Carte pisane, constituant un recueil
d'instructions complet de grande rareté. Bien qu'il n'ait pas de lien direct
avec la République de Pise médiévale, puisqu'arrivé tardivement en possession
d'une famille pisane, le portulan toutefois le port de « Pisana » et n'en
reste pas moins un document utilisé par les puissances navales de l'Italie
médiévale[29].
Des détails urbains et portuaires d'après les textes antiques
Afin de corroborer l'évolution de Pise indiquée dans les sources médiévales, quelques textes anciens offrent également des descriptifs portuaires, sans forcément évoquer d'explorations à l'intérieur des terres, mais suffisantes pour de situer l'environnement de l'estuaire depuis sa genèse.
> Environnement et infrastructures de Pise selon les sources littéraires antiques
Texte : Enée débarque à Pise pour faire alliance avec deux rois étrusques : « Il trouvera l'hospitalité en Tyrrhénie sur les bords du Lingée qui roule des eaux fumantes, à Pisae et dans les humides vallées d'Agylla (Caéré) »[30].
Texte : « Les préteurs tirèrent ensuite leurs départements au sort […].Porcius Laeca obtient la ville de Pise pour menacer les Ligures par-derrière », puis : « Dirigé vers l'Étrurie aux environs de Pise, il devait prendre deux mille hommes d'infanterie et cinq cents chevaux dans l'armée de la Gaule » [31].
Texte : (Livre V, 2-5), Saint-Pierre partit d'Antioche pour fuir Néron, débarque vers 44 av. J.-C au port de Grado. « Entre Luna et Pise, coule le Macrès. Quant à Pise, elle passe pour un ancien établissement de ces Pisatae du Péloponnèse [...] revenant de Troie où ils […] furent jetés hors de leur route, les uns vers Metapontium (Metapontion, Grande Grèce), les autres précisément sur cette côte de Pisatide (normalement, un territoire de l'Élide dans le Péloponnèse). La ville est située entre deux fleuves, l'Arnus (Arno) et l'Ausar (Auser), juste à leur confluent. Le premier de ces fleuves vient d'Arretium (Arrezo) avec un volume d'eau encore considérable, divisé en trois branches. L'autre descend directement de l'Apennin. À leur confluent […] les deux fleuves s'élèvent à une telle hauteur qu'ils empêchent absolument de se voir d'une rive à l'autre et opposent de très grands obstacles à ce qu'un vaisseau, venant de la mer, puisse remonter les vingt stades qui séparent Pise de la côte […].
La ville paraît avoir été autrefois très florissante. Aujourd'hui même, elle jouit d'un certain renom grâce à la fertilité de son territoire, à la richesse de ses carrières et à l'abondance de ses bois particulièrement propres aux constructions navales. Naguère, elle utilisait ces bois […] pour elle-même, ayant à se défendre des dangers qui la menaçaient du côté de la mer : les Ligyens, plus belliqueux que les Tyrrhéniens […]. Mais aujourd'hui que les Romains se bâtissent, jusque dans leurs villas, des palais aussi somptueux que ceux des anciens rois de Perse, ce sont les constructions de Rome qui absorbent la plus grande partie de ces bois précieux. »[32].
Decreta Pisana. Les deux décrets renseignent sur l'économie, le fonctionnement administratif et la zone urbaine avec des temples, une arche aux statues d'or, des tavernes, un cirque et des thermes publics que l'on ne peut aujourd'hui resituer. L'intitulé même de « colonie » indique une vraie dynamique politique et économique par des activités de manufacture et un commerce maritime bien établi. Les Rasinius (Rasna, ancien nom des Étrusques) sont évoqués comme actifs commercialement et socialement, avec la production et l'export de céramiques en Méditerranée. Selon le décret, leurs compétences équestres seraient aussi à l'origine de la révolution romaine conduite par Auguste[33].
Texte - Histoire Naturelle : « Le meilleur pain se fait en Italie, pourvu qu'on mêle au siligo de Campanie celui de Pise […] qui rend cinq setiers de farine » et (Livre XVIII-XX-1) : « Pise, située entre les rivières Auser et Arno, fondée par Pélops » (Livre III-VIII-1).[35].
La ville est enregistrée dans les archives : « Ils débarquent avec une armée sarde, mais ne rencontrant que des Gaulois marchant sur l'Étrurie »[36].
Bras de
fleuves comme abri protégé et plages.
Portu Pisano : ville proche de Livourne.
Portu Pisano Pisis Flavius : débarcadère sur l'Arno à Grado
Itinerarium Antonini Augusti sur le voyage d'Antonin à la demande de Jules César. Le document évoque des greniers de stockage, des villes, environ 85 000km de routes, 372 voies et comportait une carte dessinée en 210, aujourd'hui disparue.Concernant la route maritime d'Arles à Rome empruntée à la fin du Ier siècle, sont indiqués des bras de fleuves capables d'abriter les navires. L'abri protégé pour l'hivernage serait un portus avec des structures, le positio serait un abri temporaire, plagia serait en dehors d'un lieu habité. Deux intitulés désignent Pise : Portu Pisano, la ville proche de Livourne et Portu Pisano Pisis Flavius, un débarcadère à l'embouchure de l'Arno, actif à Grado.[37].
> Remarquons, que la plupart des interprétations contemporaines situent Portus Pisanus soit à Pise soit à Livourne, aucun texte ancien ne les dissocie. Pise est une ville maritime et fluviale complexe qui semblait s'étendre sur un large territoire englobant le nord de Livourne. Strabon, Tite-Live et d'autres auteurs anciens indiquent bien une seule cité portuaire florissante comportant plusieurs embarcadères.
Localisation et cartographie des anciens sites portuaires
Les premières sources permettent de situer des zones portuaires et certaines infrastructures comme un canal (Sinus Pisano), des zones urbaines et marchandes, des embarcadères. À noter que le site « Portus Limen » de l'Université de Southampton rassemble de nombreuses données sur les ports méditerranéens[38].
Physionomie et installations du port médiéval
Selon l'Itinerarium Maritimum de Namatianus au Ve siècle, le système portuaire romain se composait de Portus Pisanus sur le dernier tronçon de l'Arno à Grado, dont on atteste archéologiquement la présence et à Santo Stefano ai Lupi sur le Sinus Pisano, entre le fleuve Calambrone et Livourne. Des débarcadères secondaires sont attestés également à Isola di Migliarino à 4km du littoral au nord de Pise, cerné par trois cours d'eau : Turba, Auserclus passant au nord de Pise, une ramification de l'Auser aujourd'hui disparue et le Serchio dont on date l'utilisation aux Ve et VIe siècles.
Les recherches en archéologie numérique de G. Gattiglia montrent une interruption dans l'utilisation de structures portuaires du VIIe au VIIIe siècle qui correspond à un manque de sources littéraires, mais aussi à une absence de matériel dans le contexte stratigraphique. Pourtant, on retrouve une continuité de l'activité sidérurgique en zone urbaine et une présence d'objets sardes et lombards dans ces mêmes zones. Au niveau des rivières de Grado, d'anciennes structures de débarquement et des dépôts de bois pour la construction semblent confirmer une activité maritime jusqu'au début du Moyen-âge. Du VIIIe siècle au Xe siècle réapparaissent une multitude de débarcadères et d'infrastructures le long des voies navigables pour faciliter la manutention de marchandises avec l'arrière-pays. Des débarquements sont identifiés à Ursi, Metato et Orzignano dès le VIIIe siècle, qui permettent à Pise une expansion du trafic marchand, installant une croissance continue de sa puissance navale entre le Xe et le XIIe siècle[39].
Le médiéviste F. Redi remarque que les Pisans du Moyen-âge ont su ingénieusement maximiser la complexité d'une zone fluviale, maritime et marécageuse. La ville ne possédait pas de port, mais des systèmes pour coordonner l'activité et les équipements au sein même de la ville face au littoral. Cette articulation crée une entité commerciale unique, composée de routes, canaux, débarcadères, quais, entrepôts et magasins. C'était aussi une zone militaire protégée de tours de guet, de chaines bloquant l'accès depuis la mer et d'arsenaux pour les réparations. L'historien démontre que le système portuaire médiéval de Pise « diffère des autres ports traditionnels par son caractère diffus qui consistait en une opération multifocale, englobant une large zone urbaine fusionnée à des débarcadères fluviaux urbains, des quais et magasins situés le long de l'Arno et de l'Auser avec, sur sa côte maritime, le port lagunaire de Porto Pisano » [40].
Les deux pôles distants de 15km, reliés par des réseaux routiers, ont créé cette double fonction unique au cœur de la lagune. La situation ouverte aux fleuves et aux terres a contribué à une activité urbaine multiculturelle au-delà de la Méditerranée, reflétée par les monuments et les œuvres d'art. Cette particularité géomorphologique sépare pourtant peu à peu la ville du littoral par l'ensablement et l'accumulation de sédiments à la fin du Moyen-âge. On sait qu'en 1160, les consuls font bâtir une maison communale, une darse commerciale face au fleuve et une darse pour les réparations et l'armement[41].
Pour Olympia Vaccari, le port médiéval était doté d'infrastructures, mais aussi de plages et de bras de mer pour les débarquements non protégés, soumis à des droits pour le transit de marchandises. Les espaces étaient fortifiés et défensifs pour protéger le système économique, administratif et militaire. Cette activité dynamique transforme la géographie des lieux, détaillée sur des cartes marines essentielles à la navigation entre le XIIe et XIIIe siècle en Méditerranée. Sa position dominante se constate dans des témoignages de croisés, de voyageurs et des portulans arabes qui précisent des distances et temps de navigation[42].
Toponymie des zones d'activités portuaires
Le croisement de sources littéraires permet de retracer certaines localisations selon la toponymie des ports.
> Toponymes et infrastructures portuaires cités dans les sources littéraires.
VIIe jusqu'au IIe siècle av. J.-C < Pisae (Étrusque)
Pisa, Pisae, Pisus : (Πῖσα en Grec). Situé sur l'Arno à Grado et San Rossere.
Port de colonie d'origine grecque et étrusque. Pisae dériverait du mot « bouche » en étrusque pour signifier l'embouchure du fleuve. Pisae est un toponyme utilisé dans le Péloponnèse et en Thrace sous le nom « Pisus ». Le port signalé à Grado aurait pour étymologie latine « Gradusce » signifiant « étape » ou amarrage.
IIe av. J.-C > Portus Pisanus, Colonie de droits romains à Grado et San Rossere.
56 av. J.-C > Portus Labro, Sur le fleuve Calambrone au nord de Livourne, cité par Cicéron[43]
44 av. J.-C > Pisae (Côte Pisatide à Grado). Grado sur la rive de l'Arno à 6km de Pisae. Établissement des Pisatae grecs sur la côte Pisatide au confluent de l'Arno et l'Auser selon Strabon.
42 à 27 av. J.-C > Colonia Opsequens Iulia Pisana, Sous l'empereur Auguste[44].
280 apr. J.-C > Portu Pisano (Sur le Calambrone) + Portu Pisano Pisis Flavius (A Grado)
La ville proche de Livourne et 1 débarcadère sur l'Arno à Grado selon Antonin.
Ve-VIe siècles > Sinus Pisanus = N-E de Livourne à Santo Stefano ai Lupi + Portus Pisanus à Grado = Complexe de débarcadères à Isola di Migliarino 4km au nord du centre urbain.
- 1 Zone fluviale sur le Sinus Pisanus à 10km au sud de Pise, zone nord-est du port de Livourne proche du Calambrone à Santo Stefano ai Lupi = entrée du port Portus Pisanus ?
- 1 Zone fluviale sur l'Arno à Grado = Centre urbain de Pisae + 1 Zone de débarcadères secondaires à Isola di Migliarino, à 4km du littoral au nord de Pise, cerné par trois cours d'eau : Turba, Auserclus, une ramification de l'Auser et le Serchio.
VIIIe-Xe siècles > Porto Pisano (À Ursi et Orzignagna sur le Serchio). Port fluvial du Serchio avec débarquements à Ursi ou Offi, entre Metato et Arena au nord du Serchio, puis Fiumicello à Orzignano dans la même zone nord en amont.
Xe siècle > Portus Pisanus. Complexe englobant l'arrière-pays de Livourne dépendant de l'État indépendant de la République maritime de Pise.
À partir du XIVe siècle > Pisa. Liburnicus Portus (Livourne). Perte de l'intitulé Portus ou Porto. La ville est amputée de son identité maritime. Les activités portuaires sont à Livourne.
Cartographie des sites identifiés
Si d'après les sources littéraires, on cartographie les noms attribués aux espaces portuaires de Pise jusqu'à Livourne depuis l'antiquité jusqu'au XIIe siècle (Fig. 9), on remarque que l'ensemble des activités se concentraient à San Rossore et Grado, déjà actifs au VIIe siècle av. J.-C, cités comme ports maritimes antiques, puis vers la cité de Pise entre mer et fleuves près de l'actuelle Cathédrale de la place des miracles. Cet emplacement laisse supposer des réseaux fluviaux connectés à un bras de fleuve aujourd'hui asséché. La ville aurait fait la jonction d'une zone lagunaire protégée avec un réseau fluvial au sud l'Arno et au nord l'Auser, qui ne figure plus sur les cartes médiévales.
En comparant avec l'image satellite du littoral actuel (Fig. 10), on comprend que la zone alluviale, aujourd'hui partiellement urbanisée, indique parfaitement et visuellement l'ancien espace maritime relié aux différents ports et débarcadères. Une entrée secondaire, proche de Livourne sur le bras du Calambrone, aurait été aménagée pour accéder à différents canaux et réseaux capillaires de rivières, comme à la villa Tritturita perchée sur les falaises, citée dans les textes antiques.
L'évolution toponymique des zones portuaires reportée sur ces cartes et croisée à l'étude topographique de Pise du haut Moyen-âge par G. Gattiglia, permet de mettre en évidence l'emplacement privilégié de la ville de Pise dans son accès au littoral grâce aux fleuves[45]. Les relevés d'archéologie spatiale permettent de retracer l'ancien cours d'eau Auser et son bras secondaire Auserclus indiqué dans les textes (Fig.11). Cette donnée permet de comprendre l'emplacement originel de la cité, qui se développe ensuite sur un lit de rivière asséché et des zones humides utilisées pour diverses activités, la pêche, des matériaux, des pontons pour l'échange de marchandises avec l'arrière et plus tard, la fondation de la cathédrale, alors à proximité des zones d'activités fluviales et maritimes comme on peut l'identifier sur l'iconographie médiévale (Fig.6-7).
> Ces emplacements sont confirmés par l'étude géomorphologique de Pise au XIIe siècle par D. Kaniewski qui montre une cité positionnée sur un coude de l'Arno (Fig.11), mais aussi le tracé hypothétique de l'Auser plus au nord et avec un accès aux débarcadères principaux de San Rossore et Grado, qui subissent alors un ensablement par des dunes et alluvions[46]. C'est d'ailleurs dans cette zone que sont retrouvées plus d'une trentaine d'épaves et des centaines d'objets datant du IIe siècle av. J.-C au VIIe siècle médiéval que l'on nommera la « Pompéi des eaux ».
UNE HISTOIRE MARITIME AUSSI GLORIEUSE QU'OUBLIÉE
La représentation collective actuelle de Pise se confond toujours avec l'image d'une tour penchée. Or, particulièrement pour cette ville, les héritages des bâtis relèvent un patrimoine maritime, fluvial et rural qui ne peuvent être dissociés, compte tenu des activités associant la ville, le port et les débarcadères fluviaux. Ainsi, en abordant la genèse de cet espace actif depuis sa fondation étrusque, nous comprenons les grandes évolutions socio-économiques, environnementales et structurelles qui ont forgé la grandeur commerciale et militaire de la République de Pise, encore sous-estimée, mais qui pourraient modifier la représentation que nous en avons.
Une évolution économique, juridique, fiscale et politique régie par l'activité portuaire
D'un point de vue économique, en plus de son commerce de céramiques, de bois ou de confection en métal,Y. Renouard démontre qu'au XIe siècle, l'essor de la ville reposait sur l'industrialisation de textiles et de draps confectionnés par une laine importée d'Angleterre. Cette production marque une transformation radicale de l'import/export et des mœurs vestimentaires de la société occidentale. Ce ne sont plus les cuirs d'Afrique du Nord ou de Sardaigne qui s'importent, mais le textile qui s'exporte à la place de peaux fourrées pour l'habillement. Ceci impacte évidemment les activités dans la zone urbaine, jusqu'à ralentir la fabrication des fourreurs et cordonniers.[47]
Vers le XIIe siècle, le patrimoine foncier des familles se constituait de terres juxtaposées dans les vallées fluviales. D'importance économique et juridique, ces possessions en commun ont ouvert les activités au-delà du comté. Articulant divers statuts et investissements, les prêteurs préféreront investir des capitaux au service d'un maintien de privilèges, de l'économie et d'une politique à plus grande échelle que de posséder de terres ou des fermes[48].
Selon Olympia Vaccari, coordinatrice du Centre d'études historiques méditerranéennes de Pise, une première version juridique du port est établie au IIIe siècle par le juriste romain Ulpien indiqué comme un « lieu protégé où les marchandises sont importées et exportées ». Entre le Xe et XIIe siècle, la définition inclut les infrastructures anthropiques et les éléments environnementaux : plages d'échouage, bras de mer non protégés, etc. qui implique des droits de transit et d'utilisation selon une autorité politique. Des cartes marines du XIIe illustrent cette complexité et polyvalence territoriale à Pise[49].
Par intérêt, les seigneuries imposent d'ailleurs des règles moins strictes dans la basse vallée fluviale de l'Arno que d'autres régions. La création de communes concentre des taxes et droits seigneuriaux pour enrichir via les marchés urbains et un surplus agricole, principalement du blé revendu à prix élevé. Les parcelles groupées en propriétés, des « mezzadria » ou métairies, ont des conditions de main d'œuvre et de revente peu à peu cadrées par des contrats de cinq ans au XIIIe siècle. Parallèlement, des produits manufacturés, matières premières et produits finis intègrent les réseaux internationaux avec une forte exportation en Méditerranée et un monopole sur l'importation de produits orientaux en Europe.
Pourtant, frappée de pénuries alimentaires puis de faillites, la Toscane perd 2/3 de sa population et la moitié de son urbanisation. Ce déclin profite jusqu'en 1450 aux survivants, permettant de meilleurs salaires, un foncier moins élevé. Au XVe, la productivité reprend, le nord de l'Italie produit du coton, le sud les métaux, Lucques et Venise de la soie, l'Ombrie du papier[50].
D'un point de vue politique, l'historiographie est riche d'études sur les villes italiennes médiévales, toutefois, la plupart des archives ayant disparu pour Pise, on peut seulement confirmer des modèles dominants de structures de pouvoir, mais aussi des mutations sociales comme la révolution féodale d'origine privée et l'émergence de nouvelles institutions urbaines[51].
On sait que l'archevêque Mgr Daibert accélère l'autonomie gouvernementale par « l'arbitrage des Tours » (Lodo dei Torri) de 1089, un conflit entre familles aristocratiques et les citoyens sur la hauteur maximale de construction des tours en zones résidentielles. Ses décisions sont publiées dans un colloque communal avec la mise en œuvre d'une assemblée citoyenne. En 1091, un deuxième arbitrage, le Lodo del Valdiserchio, vient établir un calendrier de résolutions jusqu'en 1092[52]. Ces évènements marquent la vie politique de Pise, affirmant une gestion à la fois privée, ecclésiastique et communale.
Cette politique médiévale hérite de pouvoirs romains, dont les textes évoquent l'ancienne cité marchande régie par différents rois puis empereurs. Servius Tulius (575-535 av. J.-C) situe même sa fondation sous le roi Pélops au XIIIe siècle av. J.-C. C'est au IIe siècle av. J.-C qu'on lui attribue le nom de « Portus Pisanus », devenue alors colonie de droits romains. Strabon (63-25 av. J.-C) attribue sa fondation à Nestor après la guerre de Troie. Dans l'Enéide, Virgile (70-19 av. J.-C) la décrit comme un centre plus actif commercialement et militairement que la petite ville Gênes, alors sans port. De 42 à 27 av. J.-C, l'empereur Auguste la rebaptise « Colonia Opsequens Iulia Pisana »[53]. Puis, vers l'an 4 av. J.-C, sont rédigés les Decreta Pisana par Lucius Caesar et Gaius Caesar détaillant l'organisation urbaine et commerciale du port, rappelant l'activité d'une population étrusque, présente depuis huit siècles sur le littoral pisan, absorbée dorénavant par la politique romaine[54].
Une évolution environnementale responsable de suprématie comme d'oubli
Pise doit son apogée, comme son déclin, à l'environnement fluvial et non à sa proximité maritime. En effet, ce sont des aléas climatiques, les crues et l'ensablement qui enfouissent peu à peu le delta et les mouillages. L'emplacement et les activités portuaires sont sans cesse remis en question, effaçant partiellement un monopole maritime, miliaire et commercial de toute la méditerranée. De l'Arno, « elle lui doit un souvenir tangible de cette grande puissance navale, préservant ses épaves parmi ses sables et dans ses fonds marins humides » nous dit l'archéologue S. Puzzuoli[55].
Les analyses spatiales et modélisations détaillées de G. Cattiglia corroborent la distance de la mer indiquée à l'antiquité par Strabon et celle stipulée par les Romains, avec une plaine en pente depuis les Alpes, étendue vers les monts du Serchio et au nord des monts Pisani, puis vers les zones marécageuses de Massaciuccoli, fermées au sud par les falaises livournaises, face à un littoral plus étroit que l'actuel. Les données montrent qu'entre le IIe millénaire et le VIIIe siècle av. J.-C, début des installations étrusques, le delta de l'Arno est une zone marécageuse sujette à de fortes inondations. Les données géochimiques identifient plusieurs bras de rivières issus du Serchio et un autre provenant de l'Auser au nord-est du cœur historique de la ville actuelle. Toujours au Nord, on remarque un assèchement, peut-être volontaire, de marécages entre le IXe et Ve siècle av. J.-C, générant une plaine plus propice à l'installation. Mais la zone, mal drainée, demande des réajustements, voire des abandons temporaires, puis se stratifie à la fin du Moyen-âge. Le phénomène d'avancée alluviale dépendrait non seulement d'une maitrise modérée de catastrophes environnementales, mais aussi de variations climatiques du IIe au Ve siècle. L'ensemble des données n'a pas permis de reconstituer l'emplacement exact de la côte maritime du haut Moyen-âge, car l'abaissement conséquent des dunes côtières a modifié radicalement le paysage. L'unique certitude serait que le littoral se situait à 3km du centre actuel de Pise[56].
Selon les textes anciens, nous savons que la zone était naturellement protégée par des brise-lames et des phanérogames propices à casser le flux des vagues. Les zones humides du delta faisaient office d'espace portuaire dès le VIe siècle av. J.-C. Les analyses hydrographiques identifient une forte influence marine dans le bassin au IIe av. J.-C, la lagune s'étend en zone protégée propice aux activités maritimes.
Vers 180 av. J.-C, les analyses stratigraphiques montrent une plus grande densité de fragments de charbon de bois, puis une baisse conséquente vers 550 après J.-C, correspondant à une baisse d'activités agricoles.
Entre 1000 et 1200, l'influence marine diminue, puis décline en 1350, redessinant les contours du bassin en un lac côtier entouré de zones agricoles, confirmé par les données stratigraphiques. Également, les découvertes archéologiques du IIe au Ve siècle après J.-C témoignent d'une activité dans la zone maritime de Pise et l'espace fluvial de San Rossore. Les épaves, amphores, le matériel et les équipements comme des voiles, des cordages, des ancres attestent d'une grande activité portuaire, mais aussi d'évènements naturels, une forte influence marine et des crues fluviales facteurs d'abandon de certains espaces.
Les analyses de G. Catigglia confirment une lente transformation de cette histoire environnementale avec l'élévation du niveau de la mer du VIe millénaire à 4250 av. J.-C où la rive était rejointe par un chenal étroit. L'apport permanent d'eau au niveau des estuaires fluviaux aurait généré une large lagune propice à l'agriculture dès le IIIe millénaire av. J.-C.
En 2150 av. J.-C, un évènement climatique fait cesser toutes précipitations et assèche les lits fluviaux, provoquant une forte influence marine dans le delta. Deux siècles plus tard, le bassin redevient une plaine fertile alimentée par un apport en eau douce plus conséquente. Entre 1250 et 850 av. J.-C, une nouvelle période de sécheresse, un abaissement des lacs et du niveau des cours d'eau viennent de nouveau attirer le flux marin pour former l'enclave maritime au pied de Pise qui commence son installation portuaire.
Les traces archéologiques démontrent des activités commerciales et navales entre Grecs et Étrusques dès le VIIe siècle av. J.-C. Les infrastructures romaines de Portus Pisanus n'apparaissent vraiment qu'au IIe siècle av. J.-C, lorsque le débit des fleuves permet la navigation entre les canaux et la lagune. On remarque d'ailleurs un ralentissement des écosystèmes marins et une augmentation de la faune lagunaire. Le bassin portuaire devient une lagune naturelle calme et abritée que l'on pourrait qualifier et la période romaine vit une expansion démographique due aux installations pour le commerce, l'agriculture, les activités de construction navale.
De 50 à 900 après J.-C, les activités agricoles ralentissent, non à cause de crues, mais plutôt un environnement plus marécageux dans le delta.
De 493 à 812 après J.-C, l'activité portuaire et fluviale n'est marquée par aucun changement environnemental. Mais, au Ve siècle le bassin connait des transformations anthropiques, une période de guerre gothique, d'incendies et de destructions générant des dépôts. La connexion maritime est moins marquée, l'agriculture couvre alors de larges zones humides.
Du Xe et XIIe siècle, la puissance navale de Pise décale peu à peu ses activités vers le nouveau port fortifié de Livourne, signalant une diminution de l'influence marine et une augmentation de la zone côtière. Du XIVe au XVIIe siècle, le bassin pisan s'ensable et, n'étant plus en lien avec la mer, se transforme en lac côtier, la plaine est alors extrêmement inondable jusqu'en 1850[57].
Cette évolution environnementale remarquable révèle l'incroyable mutation qu'a subie la ville, avec un potentiel maritime et fluvial propice à une grande activité portuaire permettant une navigation côtière, une activité maritime dans toute la méditerranée et des navigations fluviales connectées à l'arrière-pays toscan sur plusieurs siècles.
Des aménagements et infrastructures dépassés par les aléas naturels
Pour bien comprendre l'évolution des installations portuaires, de récentes fouilles archéologiques permettent de resituer des zones actives et confirmer des emplacements utilisés ultérieurement. De la période archaïque étrusque, on sait que les techniques d'ingénierie navale ont permis des quais en pierres et en bois. Par ailleurs, Pline attribue à Pisaeus, fils de Tyrrhénus, la création de rostres plus offensifs à la proue des navires, ce qui semble préciser la présence d'arsenaux antiques[58].
La description de Rutilius Namatianus (De reditu suo, Livre I, 417 de notre ère) précise un élément environnemental d'importance : une baie est battue par les flots, exposée aux vents, non abritée de jetées, mais par de grandes algues qui empêchent les vagues de rouler. Ces éléments décriraient une large lagune aux eaux moins profondes, propices au développement d'algues phanérogames « Posidonia oceania », capables de casser l'afflux de vagues brise-roches et de générer un espace calme pour l'abri de navires[59].
Ici, l'environnement marin facilite les accès sans pour autant nécessiter d'infrastructures importantes. De plus, Rutilius situe aussi Portus Pisanus à 10km au sud de Pise dans la zone nord-est de Livourne. Si l'accès au port était confronté à une grande quantité d'algues, celui-ci ne pourrait pas se trouver à l'embouchure du fleuve Arno qui, encombré de sédiments, ne pourrait accueillir d'algues dans des eaux turbides et troubles[60].
Notons que le bassin de Pise semblait proche de la baie abritée dès l'antiquité et durant tout le Moyen-âge. À Santo Stefano dei Lupi, des fragments de céramiques du VIe et Ve siècles av. J.C confirment une zone de charge et de décharge de marchandises. Dans une même zone, des pierres de ballast, un vestige de quai en pierre, un entrepôt et une nécropole datés entre le IVe et Ve siècles, évoquent la complexité du système portuaire.
Une flotte assez variée en type de coque et en usage : militaire, commercial, activité de pêche, a côtoyé l'estuaire dont une trentaine d'épaves témoignent aujourd'hui, grâce aux conditions particulièrement propices de limon et de l'humidité. De cette « Pompéi de la mer », les archéologues supposent que l'accumulation de navires pendant environ neuf siècles correspondrait bien à six inondations dévastatrices. De plus, les objets retrouvés, marchandises, vestes en cuir, sandales, le contenu d'amphores fournissent des indications inédites sur l'organisation du port antique, les traditions, l'évolution de l'environnement comme celle de l'activité humaine.
Du Xe au XVe siècle, la proximité de marchés régionaux et internationaux influence l'économie toscane comme les infrastructures. Grâce aux routes commerciales convergeant vers Pise, les produits manufacturés transitent entre les populations depuis les villages productifs de l'arrière-pays et différents comptoirs maritimes. Les aménagements s'adaptent aux aléas environnementaux, toutefois, il est presque impossible d'identifier des piliers de ponton désagrégés, quant aux maçonneries, seules celles de San Liberata ont été retrouvées, or ces piliers ne se situent pas dans la zone urbaine[61]. De plus, les récentes interventions autour de la Tour penchée révèlent que le campanile, bâti en 1173, serait à la fois un phare symbolique spirituel comme le phare maritime du centre urbain médiéval. Cette théorie de l'historien V. Ascani se confirme par la présence d'épaves et d'objets correspondant à la même période, à moins de 200m du site[62]. L'iconographie le confirme également (Fig.6-7).
L'investissement autour du centre urbain pourrait faire suite à des désagréments avec les ports fluviaux. Selon les Annales de Bernardo Maragone, un « caligi » (« khalig » en arabe) aurait été construit vers 1160 pour améliorer la circulation des eaux dans une zone marécageuse et lacustre afin de dériver le cours de l'Arno. Ce chenal, une fosse de 50 perticae (des perches selon le système de mesures agraires) aurait représenté environ 10 080m2, mentionné également dans des documents de 1162[63]. On peut se questionner si ce chenal n'était tout simplement pas l'Auserclus connecté à l'Auser.
Ce type de réaménagement autour de l'Arno s'est déjà produit à l'époque romaine, puis sous la République maritime avec la nomination de « magistrats des eaux ». En 1157, les deux pôles portuaires sont l'un maritime au sud de Porto Pisano dans la zone marécageuse de Stagno, l'autre fluvial, directement dans la ville sur l'Arno. Alors devenu « port de chaine », les navires devaient passer dans l'alignement des tours Soarsa et San Vito pour éviter les hauts fonds (aujourd'hui Tour Magnale). D'autre part, les embarcations à faible tirant d'eau pouvaient accoster sur le rivage si l'embouchure était libre de déchets accumulés. Une darse de galères et une darse marchande composaient les infrastructures principales reliant les deux secteurs. Les hommes et marchandises embarquaient principalement à Porto Pisano, alors que l'approvisionnement des navires et l'eau potable pour les navigants se localisaient proche des canaux de Stagno et Grado où ont été aménagés des puits. Aux abords de la darse de San Vito à l'ouest, la présence de calfats et de lestages indique des espaces de réparations, mais pas de chantiers de construction navale, ni même à Livourne.
L'espace des chantiers ou « Tersana », ne sont pas identifiables avant le XIIIe siècle, précisé en 1286 par le Breve Pisanai Communis (Livre III, Chapitre 96) qui stipule des réglementations pour les activités, un « Operarius », notaire élu pour un an en charge d'entretien des galères et des édifices ainsi que des gardiens.
Des travaux de maçonnerie sont commandés jusqu'à fin 1290, pour protéger les embarcations en hivernage par des murs. Les historiens pensent que les travaux de réparations et d'entretien de navires s'opéraient face à la Tersana, en revanche aucune embarcation militaire n'a jamais été construite à Pise. Ce n'est d'ailleurs qu'après le XIIIe siècle, qu'une galerie est construite en bord de mer pour protéger les marchandises débarquées[64].
UNE HISTOIRE FLUVIALE À FAIRE ÉMERGER
Dans Le livre blanc de la recherche portuaire, A. Petit souligne l'importance des connaissances sur l'évolution tant historique qu'environnementale d'un port pour envisager de nouvelles réponses sur la gestion de l'eau, sa captation, la filtration des eaux polluées, la décharge ou le traitement des eaux de ballast, le recyclage d'hydrocarbures, la prévention contre des espèces marines invasives et l'utilisation de données numériques pour améliorer les opérations portuaires[65].
Dans cette perspective, l'historien J. Rossiaud insiste sur l'importance d'étudier plus systématiquement les ports fluviaux qui possèdent une histoire encore à explorer, en particulier par la géochronologie des ports traversiers et le statut juridique des berges urbaines qui pourraient apporter de nouvelles compréhensions à cette « Waterfront History »[66]. Cette perspective correspond bien à la configuration de Pise qui, pour le moment, a été abordée par les fouilles de complexes portuaires maritimes plus que fluviaux.
Pour L. Ozenfant, la restitution de rituels et pratiques traditionnels maritimes par le biais de récits explicatifs, permettra aussi à long terme d'éclairer la richesse et l'originalité de l'héritage portuaire pisan, pour en extraire des valeurs communes.[67]. Par ailleurs, la municipalité de Pise s'est emparée de la recherche en réorganisant l'urbanisme autour du « Musée des Navires » ouvert en 2019, proche des zones de fouilles, ainsi qu'un laboratoire de restauration de navires, avec pas moins de trente embarcations pour la guerre et le commerce sur une période du IIe siècle av. J.-C au VIIe siècle. Cette volonté d'identifier les héritages maritimes fondant la territorialisation de cette société pisane entre terres, fleuves et mer, permettra de mettre en valeur les bâtis de chaque période. Cette opération souligne les mutations conjointes du territoire, des civilisations et de l'environnement, observées non plus d'un point de vue économique, mais dans une synergie anthropique, culturelle et environnementale.
Cette histoire navale, partiellement abordée, permet de mieux comprendre les cycles de vies fondateurs de la suprématie pisane du XIe au XIIe siècle. C'est bien une identité profondément maritime qui symbolise ce complexe portuaire oublié. Transformant peut-être notre vision limitée à une simple tour penchée, l'auteur R. Borchardt a su cristalliser par son titre « Pise, solitude d'un empire », toute la gloire d'un complexe portuaire suspendu dans une histoire anéantie par la nature[68].
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[3] G. Garzella, in: K. R. Mathews, S. Orvietani Busch, S. Bruni, 2022, p. 187–215.
[4] D. Kaniewski, N. Marriner, S. Bruni et al, Op. cit., p. 1-14.
[5] M. Bini, V. Rossi, Op. cit., p. 39–58.
[6] G. Gattiglia, 2014, p. 9-11.
[7] G. Sarti, M. Bini, S. Giacomelli, 2010, p. 311-322.
[8] A. Esposito, 2020, p. 61-75.
[9] S. Pizzuoli, A. Ferrini, S. Angelo (dir.), 2017, 68 p.
Voir aussi en ligne : https://tuttatoscana.net/storia-e-microstoria-2/pisa-e-larno-storia-e-geografia-di-un-antico-sistema-portuale/
[10] L. Nuti, 1996, 276 p.
[11] L. Nuti, 2008, 176 p.
[12] C. Cagianelli, in: K. R. Mathews, S. Orvietani Busch, S. Bruni, 2022, p. 476–496.
[13] J. Vessereau, F. Préchac, 1933, p. 559-620.
Voir aussi E. Despois,1843, 110 p.
[14] P. Diacono, 1990, 240 p.
[15] De Bourgueil B., 1879, p. 18.
[16] L. Simeoni, 1940, p. 53.
[17] P. Guichard, 2000, p.66
[18] E. Salvatori, 2002, p. 17.
[19] M. Amari, C. Schiaparelli, 1883, p. 85
[20] A. Poloni, in: K. R. Mathews, S. Orvietani Busch, S. Bruni, 2022, p. 139–162.
[21] M. Balard, in: K. R. Mathews, S. Orvietani Busch, S. Bruni, 2022, p. 296-316
[22] M. Ouerfelli, 2009.
[23] E. Malamut, M. Ouerfelli, 2021, 272 p.
[24] M. Balard, Op. cit., p. 296-316.
[25] M. Bottin, 1983, p. 11-28.
[26] M. Balard, Op. cit., p. 296-316.
[27] A. Loud Graham, 2020, p. 197-198.
[28] P. Richardin, 2016, 7 p.
[29] R. J. Pujades I Bataller, p. 17-32.
[30] F. D. Dehèque, 1863, 71 p.
[31] TITE-LIVE, Histoire romaine, Livre XLII, Chapitre 23, 33-43, trad. A. Flobert, Paris, Flammarion, 1999.
[32] STRABON, Géographie, Trad. A. Vinas, Remarcle, 2019, en ligne : www.mediterranees.net/geographie/strabon/V-2.html
[33] S. Menchelli, P. Sangriso, 2017, en ligne : www.siti.cfs.unipi.it/lab-topografia-antica/files/2017/04/Menchelli-Sangriso-Tubinga.pdf
[34] VIRGILE, Enéide, Trad. A. Bellessort, Ebooks, 2008, p. 227.
[35] J. Gagé, 1928, p. 115-144. Voir aussi PLINE L'ANCIEN, Histoire Naturelle, Livre III et XVIII, trad. A. Vinas selon la version de Paris, Dubochet, 1848.
[36] POLYBE, Histoire générale, II, 27-28
[37] R. Lugand, 1926, p. 124-139.
[38] Voir: www.portuslimen.eu
[39] G. Gattiglia, 2014, p. 69-73.
[40] F. Redi, 2022, p. 319–336.
[41] G. Garzella, 1992, 4 p.
[42] O. Vaccari, Op. cit., p. 337–358.
[43] CICÉRON, Ad Quintum fratrem 2, 5
[44] M. Pasquinucci, 1995, p. 319–331.
[45] G. Gattiglia, Op. cit., p. 91
[46] D. Kaniewski, N. Marriner, Vacci M. et al., 2018, en ligne : https://www.nature.com/articles/s41598-018-29890-w#citeas
[47] Y. Renouard, 1962, p. 133.
[48] G. Rossetti, 1977, p. 159-180.
[49] O. Vaccari, Op. cit., p. 337–358.
[50] C. Quertier, Op. cit., p. 245-276.
[51] C. Wickham, 2023, p. 287-323.
[52] A. Poloni, Op. cit., p. 139–162.
[53] M. Pasquinucci, 1995, p. 319–331.
[54] S. Menchelli, P. Sangriso, Op. cit.
[55] S. Pizzuoli, 2019, en ligne : https://tuttatoscana.net/storia-e-microstoria-2/pisa-e-larno-storia-e-geografia-di-un-antico-sistema-portuale/
[56] G. Gattiglia, 2014, p. 15-16.
[57] G. Gattiglia, Op. cit., p. 15-16.
[58] S. Bruni, 2017, p. 759-777.
[59] T. Lombardi, A. Bertacchi, A. Sani, P. Tomei, 2008, p.184-185.
[60] A. Esposito, 2020, p. 61-75.
[61] M. Aglietti, in : R. Ghirlando, S. Mercieca, M. Renault, 2006, p. 143-147.
[62] V. Ascani, 2014, p. 39.
[63] P. Gautier Dalché, 1995, p. 14, 326 p.
[64] M. Aglietti, 2006, p. 143-147.
[65] A. Petit, 2022, 37 p.
[66] J. Rossiaud, 2004, p. 9-19.
[67] L. Ozenfant, 2021, p. 72-89.
[68] R. Borchardt, 1977, 196 p.